Gastro-entérite en post opératoire
Baptiste a subi une endoscopie et une opération dans la foulée le 23 mars dernier sous anesthésie générale. Le lendemain de l’opération, alors que Baptiste commençait à peine à se remettre de l’intervention, il est tombé malade.
Cet article va traiter de cette période de crise post-opératoire que l’on a vécue récemment et des enseignements que nous en avons tirés.
Le séjour à Necker
Le lendemain de l’opération trachéale, Baptiste a commencé à avoir un comportement bizarre, comme lorsqu’il est malade.
Vincent et moi avons d’abord pensé que c’était lié à l’opération, puisqu’il avait subi un jeun prolongé, qu’il avait un œdème interne lié à l’opération et qu’il avait eu une anesthésie générale, mais la situation à vite empirée.
Baptiste a commencé à vomir et à avoir un peu de température (38-38,5°C). Son état s’est très vite dégradé :
– ses yeux se sont cernés et enfoncés, ce qui lui donnait un aspect « cadavérique », désolée pour le terme mais je n’en trouve pas qui colle aussi bien à la réalité ;
– une diarrhée aiguë sévère s’est déclarée, Baptiste perdait par les selles toute l’eau qu’il ingurgitait et ce, quasiment en continu ;
– ses joues avaient perdu leur rose et Baptiste était très pâle ;
– des désaturations en oxygène, notamment pendant les brefs moments où Baptiste essayait de dormir. Sa saturation était de 78-79% de dioxygène dans le sang, alors qu’elle doit être supérieure à 90% à son âge (elle est de 100% quand Baptiste va bien). Cette désaturation, si elle dure trop longtemps peut entraîner une petite cyanose.
Après une nuit blanche très difficile, où nous avons été livrés à nous-même, où nous avons pris la décision d’oxygéner Baptiste légèrement pour lui permettre de mieux se reposer, l’équipe hospitalière du service ORL de Necker a décidé et à juste titre de nous garder en observation pendant une journée et une nuit supplémentaires.
Ce que nous déplorons un peu et ce que je vous invite à faire avec du recul, c’est :
– d’obliger un médecin à ausculter votre enfant pour vérifier son état général, car pas un seul n’a regardé Baptiste . Regarder s’il n’est pas déshydraté en lui pinçant la peau, écouter son cœur… Bref les examens habituels ;
– demander une prise de sang pour vérifier qu’il ne s’agisse pas d’une infection post-opératoire ;
– obliger l’infirmière en charge de votre enfant à lui prendre la température en rectal et pas sous le bras, méthode qui n’embête pas l’enfant, mais qui n’est absolument pas fiable, donc inutile. A titre d’exemple, pour le corps hospitalier, Baptiste avait 36,5°C corrigée (c’est-à-dire en rajoutant 0,9°C) et quand nous avons pris la température de notre bonhomme 30 secondes après en rectal, il était à 38,2°C. Nous le trouvions un peu chaud en touchant son front. Nous avons donc demandé à ce qu’il ait du doliprane ;
– demander à ce que votre enfant soit pesé régulièrement (ce que nous faisons à la maison quand Baptiste est malade), afin de surveiller la perte de poids ;
– demander une analyse bactérienne et virale des selles pour s’assurer qu’il s’agisse bien d’une gastro-entérite et déterminer son origine.
Au bout d’une journée d’observation où personne n’a observé Baptiste hormis nous, parents, nous avons pu rentrer chez nous à Rennes le 26 mars. Nous savions que le trajet allait être compliqué avec 4 heures de route et un petit bonhomme qui avait une diarrhée terrible.
Ce que je vous conseille de faire au passage, c’est un parent qui conduit et l’autre qui gère l’enfant à l’arrière du véhicule : aspirations trachéales, hydratation, etc..
La tentative de prise en charge à la maison
Lorsque nous sommes arrivés à la maison, tous les trois très fatigués, le premier réflexe a été de peser Baptiste. Le résultat était sans appel, Baptiste avait perdu 1,1 kg en 5 jours à Necker (11,4 kg en partant pour 10,3 kg à l’arrivée). Sur un enfant bien dodu c’est impressionnant mais sur un Baptiste avec peu de réserves, c’est bien pire encore.
Qu’à cela ne tienne, nous nous sommes dit avec optimisme que nous allions le « retaper » petit à petit.
Les vomissements s’étant arrêtés à Paris, nous avons donné une alimentation normale à Baptiste qui mangeait de bon appétit. Nous avons pris la décision de réutiliser la gastrostomie mais uniquement pour la réhydratation. Cela faisait tellement longtemps que nous ne l’avions pas utilisée que nous avons dû nous re-familiariser avec tout le matériel (pompe, tubulures…) que nous utilisions pluri-quotidiennement avant que Baptiste ne mange tout seul. Cela a été une étape à franchir psychologiquement pour nous, car notre objectif proche est d’enlever cet appareillage à Baptiste définitivement, aussi nous nous sommes dit que c’était comme une perfusion.
Pour cela, comme Baptiste faisait 10 kg, nous avons tablé sur une hydratation de 1L d’adiaril sur une journée (100 mL par kg). A chaque fois qu’on couchait Baptiste (plusieurs fois par jour car il était épuisé), on lui mettait de l’adiaril en hydratation artificielle à un débit de 100 mL par heure.
Petit aparte sur l’adiaril :
Il s’agit d’une de solutions glycoélectrolytiques recommandées dans le cas de diarrhées très importantes
chez les nourrissons et jeunes enfants. Il s’agit d’une poudre en sachet ; un sachet est à mélanger dans 200 mL d’eau minérale.
chez les nourrissons et jeunes enfants. Il s’agit d’une poudre en sachet ; un sachet est à mélanger dans 200 mL d’eau minérale.
Pourquoi donner ce type de solution plutôt que de l’eau uniquement ? Parce que la diarrhée aiguë entraîne une perte importante d’eau mais également de sels minéraux.
Les ingrédients présents dans la poudre sont les suivants : glucose, saccharose, gluconate de potassium, citrate de sodium et chlorure de sodium (en gros du sucre et des sels minéraux).
Manque de bol, le lendemain Vincent était malade (sans doute une gastro version light comparée à Baptiste) et donc pas opérationnel. Comme je ne me voyais pas de gérer Baptiste dans cet état toute seule et avec la fatigue accumulée, j’ai appelé mes parents à la rescousse.
Après des dizaines et des dizaines de couches, de douches, de tentatives de grand-mère (boire l’eau de cuisson du riz, ultra-levures, manger des carottes broyées, etc.) et malgré le traitement de réhydratation, alors que Baptiste n’arrêtait pas de boire et de manger, nous avons décidé de le peser à nouveau, et là le résultat sur la balance nous a littéralement démunis et effrayés : 9,6 kg (1,8 kg perdu en 6 jours).
Baptiste n’avait plus que la peau sur les os, on voyait même se dessiner l’emplacement de son cœur sous sa peau, je n’avais jamais vu ça… Il ne tenait plus debout et était tombé dans la journée car ses jambes avaient lâché, il avait un érythème fessier très très étendu jusqu’en bas du dos, était très pâle et creusé.
Nous avons eu peur de plusieurs choses :
– que Baptiste ait un souci respiratoire à cause de sa faiblesse générale, et là nous n’avons rien à la maison pour l’oxygéner ;
– qu’il continue à perdre du poids ;
– que la déshydratation lui abîme les reins ;
– voire pire…
A 22h le dimanche, nous voilà partis en trombe à l’hôpital sud après avoir fait quelques sacs d’affaires, avec comme objectif une admission de Baptiste en réanimation pédiatrique.
Vincent et moi en profitons pour remercier mes parents pour leur soutien pendant cette période difficile, ça fait du bien d’être accompagnés pour la phase opérationnelle.
La prise en charge en réanimation pédiatrique
Je me suis rendue avec Baptiste aux urgences, pendant que Vincent se rendait directement en réanimation pour les implorer de prendre Baptiste en réa.
Pour la première fois, notre cas a été traité en 45 minutes maximum entre le moment où nous sommes arrivés et le moment où Baptiste était installé dans sa chambre. Le médecin de réa est descendu directement aux urgences pour examiner Baptiste. Je pense qu’il a pris Baptiste autant pour son état général que pour notre désarroi et notre fatigue.
Nous avons déjà gérer pas mal de situations de crise (réanimation de Baptiste à la maison, chaque fois que Baptiste attrape un truc, nombreuses opérations, …) mais celle-ci a été vraiment dure à gérer, sans doute aussi parce que nous étions très fatigués d’avoir eu à gérer complètement Baptiste à Necker (nourriture, soins, décisions, etc.). Il faut savoir que dès que nous sommes dans un autre service que la réanimation quelque soit l’hôpital, Vincent et moi ne pouvons jamais quitter Baptiste en même temps, c’est beaucoup trop dangereux… J’évoquerai un de ces jours ce dernier point dans un article dédié.
Le protocole à suivre pour faire face à une situation comme celle que nous avons vécue est le suivant (celui qu’a suivi la réa et qui a fonctionné) :
– si l’enfant ne vomit plus, privilégier la réhydratation peros ou par gastrostomie et en dernier recours envisager la perfusion. Baptiste a donc été hydraté avec de l‘adiaril en continu (c’est-à-dire jour et nuit) avec un ratio de 100 mL pour un kg, soit 1L par jour pour Baptiste (débit 41 mL par heure). Donc à la maison nous étions plutôt pas mal sur ce point-là ;
– arrêter temporairement l’alimentation lorsqu’on a l’impression que la diarrhée de l’enfant entraîne une perte de liquide plus importante que les entrées (une demi-journée en réa) ;
– reprendre l’alimentation doucement avec des compotes (pomme/banane, pomme/coing) et des yaourts (contiennent des ferments lactiques) en évitant le lait ;
– si la diarrhée reprend avec l’alimentation, comme ça a été notre cas, stopper à nouveau l’alimentation pour la reprendre plus tard ;
– tant qu’on n’est pas certain que la diarrhée s’est atténuée, il est nécessaire de maintenir l’hydratation telle que décrite au point n°1.
Afin de protéger ses fesses contre la diarrhée continue à l’origine de rougeurs intenses, Elodie, l’infirmière de Baptiste a utilisé de l’orobase (qui fera l’objet d’un prochain article). C’est une pâte disponible sur ordonnance utilisée dans les cas de stomie, pour protéger la peau des sucs gastriques, de l’urine ou des selles. Force est d’admettre que cette pâte difficile à appliquer a été couronnée de succès.
Les médecins ont demandé de suite une prise de sang, car ils voulaient écarter l’infection post-opératoire, ainsi que des prélèvements de selles (pour analyse bactérienne et virale) afin de s’assurer qu’il s’agissait bien d’une gastro-entérite.
Quelques jours plus tard, le résultat est tombé, le responsable est ROTAVIRUS.
Un méchant virus qui provoque des gastro-entérites chez les jeunes enfants. Après une incubation d’un à trois jours, des selles fréquentes et liquides apparaissent très soudainement. Le foie peut être atteint (selles claires et urines foncées). Il provoque une légère fièvre et parfois des vomissements. L’enfant est guéri au bout de 4 à 7 jours. Nous avons donc eu la version longue.
Dès le lendemain de l’admission en réa, soit après une nuit, Baptiste avait déjà repris 200 g sans être alimenté. Cette prise de poids a continué progressivement au fil des jours jusqu’à sa sortie le mercredi. Les médecins se sont assurés que Baptiste n’avait plus de diarrhée aiguë avant de nous laisser sortir.
Cela faisait un an que nous n’avions pas été admis en réa et je dois avouer que ça nous a permis de nous reposer un peu et de laisser des personnes compétentes gérer la situation et prendre les décisions.
Quel confort, merci à eux et à leur professionnalisme…
C’est le seul endroit au monde excepté la maison, où Baptiste est en sécurité même lorsque nous ne sommes pas présents, le monde n’étant pas habitué à gérer des enfants VACTERL.
Quelques éléments sur la déshydratation de Baptiste
Baptiste a eu une déshydratation extrême, c’est-à-dire qu’il a perdu plus de 10% de son poids initial.
En cas de diarrhée aiguë, il n’est pas rare de perdre entre 5 et 10% de son poids de base.
La réa nous a confirmé que nous avions bien fait de l’emmener à l’hôpital et que sans nos tentatives de réhydratation à la maison, les reins auraient pu être abîmés. Donc si j’ai un conseil à donner, faites comme nous si la situation devient trop difficiles à gérer et emmener votre enfant aux urgences.
Les symptômes visibles de déshydratation que nous avons pu observer sont les suivants :
– soif extrême, Baptiste ne faisait que demander de l’eau alors qu’il boit assez peu en temps normal ;
– yeux enfoncés et cernés ;
– vertige et chute ;
– fatigue excessive ;
– urine colorée ;
– la peau collée aux os, notamment au niveau des côtes ;
– évidemment une perte de poids.
Ce n’est pas une liste exhaustive du tout, attention.
Comment est-il aujourd’hui, 4 jours après sa sortie ?
Baptiste est un petit bonhomme plein de ressources, deux jours après sa sortie de réa, il était de retour à son poids de base. Il n‘arrête pas de manger et a retrouvé ses grosses joues. Il court dans toute la maison, rigole, bref tout va bien, nous avons retrouvé notre petit chou.
Tout ceci est désormais derrière nous, il ne reste plus qu’à nous reposer un peu :).
Bon courage à tous, tenons bon !
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